Direct Action
Le film suit une communauté de militants en France, composée de squatters, d’anarchistes, d’agriculteurs et d'”éco-terroristes” selon le gouvernement, afin de mieux comprendre comment le succès d’un mouvement protestataire radical peut ouvrir une voie à travers l’actuelle crise climatique mondiale.
Quand le pouvoir politique défend les intérêts privés contre le bien commun, l’action directe est inévitable. Au cours de ce début de siècle, en France, l’activisme environnemental en a notoirement payé le prix fort durant les répressions des manifestations contre le projet d’aéroport du Grand-Ouest en 2012 et contre les méga-bassines à Sainte-Soline le 25 mars 2023. Mais il a aussi, entre ces deux évènements, remporté une victoire insolente en établissant avec succès une Zone à Défendre à Notre-Dame-des-Landes, où l’idée d’action directe peut désormais s’entendre au-delà du conflit avec l’État, et qualifier une manière de vivre en accord avec la terre. Ben Russell et Guillaume Cailleau ont filmé dans la ZAD pendant deux ans, entre la commémoration festive des dix ans de l’échec de l’Opération César et l’action menée par les Soulèvements de la Terre à Saint-Soline, accueillie par un spectacle policier digne d’Apocalypse Now. À bien des égards, Direct Action évoque et inverse la série Sanrizuka de Shinsuke Ogawa autour de la lutte paysanne contre la construction de l’aéroport de Narita ; la récurrence des apparitions du phare qui s’érige désormais fièrement en lieu et place d’une tour de contrôle qui n’a pas vu le jour, ne manque pas d’y faire songer. À Notre-Dame-des-Landes, il est possible d’observer ce qui se passe lorsqu’une vision jusque-là cantonnée à l’utopie se permet de remplacer l’avenir promis par les tenants de la croissance économique. En quarante et un longs plans qui refusent l’équation trop souvent automatique des discours militants et des formes conventionnelles du cinéma direct, Direct Action nous donne en retour pleinement le temps de l’habiter.
Antoine Thirion
Lire l’entretien avec Ben Russell et Guillaume Cailleau
Guillaume Cailleau (France, 1978) est un artiste, cinéaste et producteur de films basé à Berlin qui explore de nouvelles manières d’aborder les problèmes politiques et sociaux. Ses films ont été projetés dans des festivals de cinéma (Berlin, New York, Rotterdam, Édimbourg) et son travail a été exposé dans des institutions artistiques telles que le Bangkok Art & Culture Centre, le Royal Ontario Museum, la Haus der Kulturen der Welt et le Centre Pompidou. . En 2014, il remporte l’Ours d’argent du jury au Festival international du film de Berlin pour son court métrage Laborat. Il produit des films avec sa société CASKFILMS. Direct Action est son premier long métrage.
Artiste, cinéaste et curateur né aux États-Unis en 1976 et basé à Marseille, dont le travail se situe à la croisée de l’ethnographie et du psychédélisme, Ben Russell a exposé à la Documenta 14 (2017) et son travail a été présenté au Centre Georges Pompidou, au Museum of Modern Art, à la Tate Modern, au Museum of Modern Art Chicago, à la Mostra de Venise et à la Berlinale, entre autres. Il est lauréat d’une bourse Guggenheim (2008), du Prix de la critique internationale FIPRESCI (IFFR 2010, Gijón 2017). Direct Action est son cinquième long métrage.