Homing
Les oiseaux introduits aux Amériques par les colons européens ont chassé les hirondelles noires de leur habitat naturel, si bien qu’elles ne peuvent plus habiter que des nichoirs construits par les humains pour éviter leur extinction. Le film suit leur migration d’Amazonie jusqu’aux lieux dont elles dépendent.
Ce beau mot anglais que l’on comprend d’instinct, homing, n’a pas vraiment d’équivalent chez nous, sinon peut-être cette périphrase très opportune : faire son nid. De manière plus générale, la homing season désigne la période qui voit les oiseaux revenir de leur migration, autrement dit rentrer à la maison. Aux hirondelles noires d’Amérique du Nord, voilà qui pose un problème. Délogées il y a des siècles par la colonisation du continent, elles ont dû compter depuis sur l’hospitalité de l’espèce humaine. Homing restitue leur voyage et les modalités du secours des hommes, lesquels apparaissent comme d’anonymes géants. Car Tamer Hassan, qui dit que le film s’est laissé guidé par les hirondelles, tenait à retracer l’intimité particulière nouée dans les gestes invraisemblablement minutieux des ornithologues, dont dépend la survie de l’espèce. Et surtout, dans un élan désormais commun à beaucoup de films sur la nature, trouver des moyens de réapprendre à voir, et donc regarder autrement. Ainsi le film va et vient entre deux échelles antagonistes, l’une très large qui capte le mouvement des nuées d’hirondelles, l’autre infinitésimale quand les oiseaux sont aux mains (immenses) des hommes, avec leurs gestes de dentellières. De fait, il n’est pas certain qu’on ait déjà regardé les oiseaux comme ça, dans ce fort saisissement où cohabitent mystérieusement une impression d’étrangeté et une autre d’extrême familiarité. Une scène le dit particulièrement nettement, qui couve de l’œil une portée d’oisillons : ces infimes créatures que le film ramène à notre échelle sont nos sœurs plus qu’on ne croit.
Jérôme Momcilovic
Tamer Hassan a projeté ses films à l’international, notamment à la Viennale, Art of the Real, Mar Del Plata, Punto de Vista et Sheffield DocFest. Il a été membre du Flaherty Film Seminar et a participé au programme Berlinale Talents. Il enseigne actuellement à la Parsons School of Design.
Tamer Hassan
Tamer Hassan
Julian Flavin
Tamer Hassan
Tamer Hassan tamerhanyhassan@gmail.com