La Laguna del Soldado
Interrogeant la construction de l’histoire orale et sa relation à la terre, le film sillonne le páramo, archive vivante et insaisissable, naviguant dans le brouillard dense suspendu entre le passé de Simon Bolivar et le présent de la Colombie.
La Laguna del Soldado est le deuxième volet d’une trilogie consacrée à la figure de Simon Bolivar. Pablo Alvarez-Mesa y invoque l’esprit du Libertador dans les lieux où se sont déroulées ses batailles pour sonder la violence qui demeure dans l’espace politique et social colombien. Tandis que Bicentenario, achevé en 2021 l’année du deux-centième anniversaire de l’indépendance, interrogeait ce que le pays célèbre exactement lors des commémorations nationales, ce nouveau film s’intéresse plus précisément aux paysages d’un épisode célèbre de la campagne de libération, le Passage des Andes, durant lequel l’armée indépendantiste traversa les hauts plateaux de la cordillère Orientale par la voie ardue du paramo de Pisba ; les cadavres de plus d’une centaine de soldats morts de froids ou de faim furent découverts dans un lagon transformé en charnier, aujourd’hui marqué d’une stèle. Si Bicentenario évoquait une séance ou un exorcisme, La Laguna del Soldado est un rêve fiévreux introduit par un poème de Bolivar, « Mi delirio sobre el Chimborazo », auquel le cinéaste Camilo Restrepo prête sa voix, la première d’un chœur évoquant les particularités indigènes et allogènes du lieu, son histoire coloniale, les effets sur l’environnement de la présence militaire, ou la nécessité de stratégies de préservation respectueuse des populations. Dans ce film d’une beauté stupéfiante, des paysages nébuleux se dissolvent les uns dans les autres en un montage aqueux, dont des séquences expérimentales tonitruantes perturbent la fausse tranquillité.
Antoine Thirion
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Pablo Álvarez-Mesa est un cinéaste, directeur de la photographie et monteur qui travaille principalement dans le domaine de la non-fiction. Ses films ont été présentés et récompensés dans des festivals internationaux tels que la Berlinale, l’IFFR, la Viennale, le MoMA, Visions du Réel et le RIDM. Son travail cinématographique porte sur la relation entre les faits et la fiction, entre ce dont on se souvient et ce qui est inévitablement construit. Pablo est boursier du Sundance Doc Fund, membre affilié du Centre for Oral History and Digital Storytelling de l’Université Concordia, et ancien élève de Berlinale Talents, du Banff Centre for the Arts et du Centre canadien du film.
Pablo Alvarez Mesa
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Alex Lane, Erin Ryan / Pablo Alvarez Mesa
Pablo Alvarez Mesa
Stefan Schneider, Alex Lane
Pablo Alvarez Mesa soldierslagoonfilm@gmail.com