Loin de moi la colère
Il y a eu de nombreux morts au village de Ziglo, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, pendant la guerre civile de 2011. Ayant trop attendu la justice d’État, Josiane, dite Maman Jo, une femme autochtone qui a perdu plusieurs membres de sa famille, a décidé de prendre en main le destin du village en créant un espace de parole pour les femmes.
Ici, il est question de crimes et de survie à ces crimes. Pas la survie immédiate, mais la survie sur le long terme, celle des chairs et des mémoires. La survie pour la liberté, sans doute. Comment se réparer et retrouver sa liberté à Zéaglo ? Ce village de Côte d’Ivoire doit survivre au massacre de Duékoué advenu lors de la crise postélectorale de 2010-2011. Le village demeure depuis dans une souffrance dans laquelle nombre d’habitantes et d’habitants sont enfermés. Les victimes et leurs bourreaux cohabitent, les deuils sont nombreux et lourds et la parole ne circule plus. C’est à cette parole que Josiane fait confiance pour trouver la paix, qui selon elle peut advenir à condition de se réunir. Passant de case en case, le film l’accompagne dans sa collecte de témoignages. Découlent de là les récits, d’une violence effroyable, d’une multitude de vies réduites. Les femmes parlent d’elles comme des fantômes, séparées par l’appartenance à des communautés différentes et réunies par leur silence et leur solitude. Alors, des restes d’une maison brûlée lors des massacres, se bâtit une maison pour se rassembler. On n’abandonne pas les fantômes, on les habite. Des enchaînements de récits individuels à un cadre élargi où siégera tout le monde : le mouvement du film est celui de la réunion. Les histoires convergent vers cette maison où s’élabore une justice réparatrice qui ne prêche pas le pardon inconditionnel mais cherche la reconnaissance des torts. D’histoires isolées en récits partagés, la parole fabrique un espace commun, dans la maison on fait présence. Pas de retour sur l’Histoire, pas de fresque ou de faits politiques, ce qui compte c’est juste être là, physiquement, politiquement : écouter, faire tomber les séparations et tenter de réparer.
Clémence Arrivé Guezengar
Joël Akafou
Né en 1986 à Bouaké (Côte d’Ivoire), il est diplômé d’un master 2 professionnel en réalisation cinéma à L’ISIS (Institut Supérieur de L’Image et du Son Ouagadougou). Il a réalisé quelques courts métrages documentaire et fiction dans le cadre scolaire dont le dernier, Nourah, a été sélectionné dans de nombreux festivals.
Son premier film documentaire professionnel Vivre riche est suivi par Traverser, son premier long-métrage documentaire, sélectionné à Berlin.
Les films du continent, Pilumpiku Productions, L'Œil Vif Productions,Lyon Capitale TV
Joël Akafou
Marius Bolou, Wilfried Mabea
Rodolphe Molla
Lady Birds Films / mchance@ladybirdsfilms.fr