Manal Issa, 2024
A Beyrouth le 22 septembre 2024, quelques heures seulement avant l’escalade de bombardements dans tout le pays, l’actrice franco-libanaise Manal Issa interroge le rôle des acteurs pendant le conflit mondial en cours.
Avec Manal Issa, 2024, Elisabeth Subrin prolonge son exploration du reenactment pour interroger les représentations féminines et les mécanismes de pouvoir qui les façonnent. Après Maria Schneider, 1983, où trois actrices, dont la franco-libanaise Manal Issa, rejouent une interview de Maria Schneider, Subrin confie cette fois à Issa les questions, absentes du montage, posées à Schneider à l’époque, afin qu’elle y apporte son propre point de vue. L’actrice livre un témoignage essentiel et intransigeant sur son métier et sa portée politique aujourd’hui.
La scène semble se dérouler dans un café. La caméra, fixe devant une chaise vide, nous place comme des interlocuteurs, face à un personnage hors champ. Quelques objets posés sur une table – une cigarette qui se consume au fil des plans, un téléphone, une tasse de café – signalent sa présence. Des variations de lumière ponctuent les plans fixes, tandis qu’une vitre, sur le côté, laisse entrevoir le mouvement incessant de la ville. Sa voix habite l’espace. Elle interroge ce que signifie être actrice dans le contexte actuel de la guerre, et la place qui lui est assignée dans l’industrie du cinéma.
Tourné à Beyrouth, avec une partie de l’équipe contrainte de travailler à distance depuis New York, le film capte la ville en toile de fond, où les bruits sourds des tensions retentissent. Quelques heures après l’enregistrement, les bombardements au Liban s’intensifiaient. Entre présence et absence, la parole d’Issa résonne au-delà de l’écran, avec une acuité politique implacable.
Nepheli Gambade
Elisabeth Subrin
Réalisatrice et artiste primée basée à New York, ses films et installations vidéo ont été présentés dans de nombreux festivals et expositions, avec notamment des expositions personnelles au Museum of Modern Art, NY, à la Film Society du Lincoln Center, NY, et à la Viennale. Son premier long métrage de fiction, A Woman, A Part, est sorti en salles en 2017. Son court-métrage Maria Schneider, 1983 a été récompensé du César du meilleur court-métrage documentaire en 2023. Elle enseigne également au Film and Media Art à Temple University et vit à Brooklyn, New York.
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Manifest Pictures / andrea@manifest.pictures