Remanence

Combinant deux sources d’archives uniques récemment découvertes, ce court métrage évoque l’histoire perdue d’un mouvement pacifiste féminin néerlandais qui a rassemblé des femmes dans le cadre d’une action collective dans les années 1930.

En 1981, deux chercheuses ont enregistré les témoignages des membres désormais octogénaires d’un mouvement hollandais pacifiste et féministe d’avant-guerre. L’une d’entre elles, confrontée à une mémoire qui lui fait défaut, regrette de ne pas avoir pu mettre la main sur un film tourné lors d’une action collective finale à Rotterdam en 1939 avant les bombardements, film oublié dans une collection privée après l’exécution de son auteur pendant la guerre. Ces deux archives, récemment retrouvées et presque jamais vues ni entendues, constituent la matière de Remanence. Le titre du film de Sabine Groenewegen qualifie l’effet visé par un processus de stratification des temps. À chaque niveau, ce qui compte est ce qui persiste après que l’événement a passé, les traces qu’il laisse dans la mémoire des protagonistes puis en chaque spectatrice et spectateur appelé.e.s à entendre les échos des politiques de genre et à penser historiquement le présent. Les expériences intimes et politiques de ces femmes servent à révéler une histoire de lutte internationaliste contre la montée du fascisme garantissant la reconduite des conventions patriarcales, par laquelle elles se reliaient à d’autres luttes féministes dans le monde entier. Peu de documents subsistent de cette histoire dont les actrices ont dû détruire ou brûler ce qui aurait pu les compromettre. Privilégiant la réverbération de la mémoire à la fétichisation de l’archive, Remanence en assure la perpétuation.

Antoine Thirion