The Other Queen of Memphis

Memphis, Tennessee. La rappeuse Lachat (Chastity Daniels) nous emmène à travers différents récits, les siens, pour nous guider dans cette ville peuplée de fantômes et de rêves.

Memphis, extérieur, froid. La première Queen c’est Tash, rappeuse locale adulée aux dents d’or. Au volant de sa voiture, elle nous guide à travers son histoire sinueuse qui ressemble un peu à cette ville, ou du moins à la vision qu’elle veut bien nous en transmettre. À ses côtés, le film accepte de s’égarer et prend assez vite la forme d’une quête trouble : raconter la communauté de rappeurs et de rappeuses de Memphis, les succès, les angles morts, les inspirations, les disparitions, les joies et les violences. Tash est ici souveraine, elle conduit ses histoires aux lieux qui les concernent et devient par cette mystérieuse dérive une reine secrète, celle de ruines qu’elle nous rend visibles. Mais alors qu’il part sur une rencontre, le film se refuse au portrait. Derrière la première reine, depuis l’invisible justement, couve son double. Une autre rappeuse, l’autre reine : Gangsta Boo. Immense mais détruite par cette ville et ses histoires. Ce serait trop de dire qu’elle est un fantôme, elle existe par Tash, qui la révèle. Cette autre reine est un peu comme Tash, et puis un peu comme cette ville, encore là et plus vraiment à la fois. Quoi de mieux qu’un film de bagnole, en mouvement : pour raconter sans trop en dire, aller vite, travailler le mystère et trouver sa bonne distance. Le cadre ultime, la distance juste serait celui de la fenêtre de la voiture : un cadre dans le cadre découpé à l’américaine. Un cadre en passant, qui s’arrête sur les gens, leurs règles, leur musique, nos fantasmes, leurs vies indicibles, leurs dents, et leurs histoires pour or. 

Clémence Arrivé Guezengar